PRENEZ GARDE AUX ORDONNANCES
Une nouvelle controverse a apparu dans l’application du 2e alinéa de l’article 1973 C.c.Q. relativement au non-respect par un locataire d’une ordonnance de payer le premier jour de chaque mois.
En effet, dans la parution du Proprio de mai 2010, nous abordions cette question. Or, il appert que la situation a évolué, soulevant de nouvelles questions et causant des maux de tête aux propriétaires.
Afin de mieux comprendre la problématique, il importe de lire attentivement la disposition applicable :
Plusieurs décisions démontrent que l’interprétation de cet article commandait une résiliation automatique à la demande du locateur lorsque ce dernier démontre l’existence d’une ordonnance et la contravention par le locataire à cette ordonnance. La décision rendue par l’honorable Pierre Labbé, juge de la Cour du Québec dans le dossier Office municipal d’Habitation de Plessisville c. Drapeau fait d’ailleurs un portrait complet de l’état de la jurisprudence à ce moment.
Or, des décisions rendues en 2010 sont venues tempérer cette position et freiner l’application de la résiliation automatique. La Cour du Québec a effectivement statué que la Régie du logement doit s’assurer que l’ordonnance émise est toujours en vigueur et que le locateur n’a pas renoncé à son application. Nous vous mettions d’ailleurs en garde dans la parution de Mai 2010 :
Également, la Cour du Québec indique que l’ordonnance rendue par la Régie du logement en vertu du premier alinéa de l’article 1973 C.c.Q. doit être claire. Nous vous conseillons donc, lors de l’audition, d’un dossier de résiliation de bail pour retards fréquents, de faire quelques représentations à cet effet. Vous pourrez en effet demander au régisseur que, dans l’éventualité où celui-ci exercerait sa discrétion et choisirait d’émettre une ordonnance, cette ordonnance soit valide pour le bail en cours et ses renouvellements et qu’advenant le non-respect, la résiliation soit accordée en vertu du 2e alinéa de l’article 1973 C.c.Q.
Il semble maintenant que de plus en plus de décisions soient rendues par la Régie du logement, refusant le résiliation du bail pour non-respect d’ordonnance. En effet, une incertitude et une certaine réticence amènent les régisseurs à laisser le bénéfice de la controverse aux locataires, causant ainsi un préjudice sérieux aux locateurs.
La problématique est réelle et se doit d’être clarifiée. La Cour du Québec a d’ailleurs accordé la permission d’appeler sur ce point dans quelques dossiers, dont notamment Jean-Louis c. Agnelli (10 novembre 2010) et Kechache c. Pita (4 mai 2011). Nous espérons que ces décisions à venir permettront d’établir des règles claires que pourront appliquer les régisseurs de la Régie du logement.
D’ici là, soyez prudents dans l’exercice de vos droits et n’hésitez pas à vous informer en cas de doute.
Gagnon & Associés